Mon p'tit Papa chéri,
J'ai écrit ces quelques lignes au petit matin, tu sais, quand la nature se réveille, quand tout est calme avec les rayons du soleil rasant la campagne, accompagné du chant des oiseaux ... ce moment que tu aimais tant, qui te ressourçait, ce moment où tu prenais le temps d’observer les allers venus des oiseaux, dans le silence. Tu me disais même que tu reconnaissais les oiseaux qui venaient et revenaient chaque jour picorer les boules de graines que tu suspendais dans les arbres
Papa, j’ai réussi à te dire, tout ce que j’avais dans le cœur, avant que tu partes, et j’espère que tu as entendu mes mots dans ton sommeil : que tu as entendu que toute ta vie, tu as été un homme bon, profondément humain, te souciant des autres avant toi-même ; tolérant, empathique, courageux, entreprenant, … mais ce qui m’émouvait le plus chez toi, c’était ta résilience … parce que la vie ne t’a pas fait de cadeau, …Tu voulais offrir à tes enfants et tes petits enfants tout l’amour et l’attention que tu aurais aimé recevoir, enfant
Et je te le dis : oui, Papa, tu as réussi !!
Notre relation, elle était profonde. Toi et moi, nous n’étions pas très démonstratifs, par pudeur, par réserve mais elle était très intense. Une situation, un regard, un mot suffisait pour nous comprendre
Ton métier, tu l’as pas choisi mais parce que tu visais toujours la perfection dans tout, tu as toujours voulu progresser dans ton métier. Tu te levais à minuit ou 2 h du matin, mettais le nez dans tes bouquins pour apprendre, faire toujours mieux, innover, expérimenter .. et tout ça, avant de démarrer ta nuit de travail.
Je t’ai toujours vu travailler Papa, trop travaillé, tu t’es usé en travaillant nuit et jour. Je te vois encore, à chaque repas, t’endormir à table d’épuisement, et ça, ça me faisait beaucoup de peine pour toi.
Tu étais aussi un Epicurien généreux, tu aimais les plaisirs simples de la vie : partager un bon repas, savourer un bon vin, entouré de ta famille ou de tes amis.
Je me souviens, gamine, des fêtes que tu organisais avec maman à notre maison de campagne à Marcerolles. Même si tu n’avais dormi que 2 ou 3 heures durant les 24 dernières heures, tu trouvais encore l’énergie et le plaisir de recevoir tes amis, ta famille et d’organiser des grandes tablées, avec barbecues géants et cochon de lait à la broche, et j’en passe … Je revois ton visage fatigué, épuisé et en même temps ton œil rieur et blagueur, entouré de tes amis, ou de ta famille. Tu aimais danser le rock ; et même là c’était toujours dans l’excès, chemise trempée de sueur, jusqu’à l’épuisement
Je me souviens aussi, que tu t’organisais pour t’échapper au plus tôt du fournil, pour retrouver ta maison de campagne, ton hâvre de paix... à peine arrivé sur place, tu faisais le ménage à la maison ; je te vois encore en train de passer la lustreuse sur les terres cuites de la maison, la musique à fond !
En parallèle de ton métier, tu as toujours eu la passion pour le jardin
Travailler en plein air, toi qui étais confiné dans le fournil, C’était ton refuge, ta ressource, ton oxygène
Tu aimais travailler la terre, créer de nouveaux paysages à la force de tes bras.
Tu avais toujours de nouvelles idées : créer une fontaine ici pour écouter le bruit de l’eau, puis y mettre des poissons rouges, puis créer une cascade là, planter, déterrer puis replanter
Tout devait être parfait, à ton goût et fallait pas qu’il y ait une seule feuille qui traine par terre, sinon t’étais contrarié !!
Je t’entends encore pester contre le vent parce qu’il amenait des feuilles sur la terrasse
Toujours est-il qu’il était merveilleux ton jardin Papa, comme toi !
Tu as été au sens propre comme au sens figuré, une force de la nature, exigeant avec toi-même, repoussant toujours les limites pour atteindre la perfection
Tu as même transmis ta passion à Manu, qui en a fait son nouveau métier
Vous étiez complices tous les 2 parce que chacun connaissait les exigences de l’autre
Merci Papa pour tout ce que tu m’as donné, transmis. Tes valeurs humanistes, ton courage, ta persévérance, ta résilience.
Merci pour ta protection, pour ton soutien, ton amour inconditionnel dans toutes les épreuves de ma vie. Même si tu n’étais pas toujours d’accord avec moi sur le fond, Tu me disais : « Fais ce qui te parait le mieux pour toi, ma fille !! »
Je n’ai qu’un seul regret Papa, j’aurai vraiment voulu te ramener à la maison, pour que tu puisses à nouveau t’installer sous ton mûrier platane, que tu aimais tant et écouter une dernière fois le Chant des oiseaux... je te l’avais promis mais il nous a manqué quelques jours pour organiser ton retour
Ne t’inquiète pas, ne t’inquiète plus Papa, Manu et moi, on s’occupe de maman et de ton jardin
Je t’aime tant
Mais je sais que tu fais partie de moi, à jamais ... alors je t'emporte et je te garde avec moi pour toujours.
Ta fille chérie